La régulation du marché de carbone au Québec : une menace ou un avantage pour l’attractivité du cadre juridique de l’investissement direct étranger?
Le 1e janvier 2015 a marqué le premier anniversaire de la mise en vigueur officielle de l’accord entre le Québec et la Californie sur la régularisation du marché de carbone pour la réduction de GES. En effet, les premières démarches depuis 2008 en faveur de la protection de l’environnement avaient déjà permis au Québec de rejoindre la Western climate initiative (WCI). De plus, l’aboutissement à cette entente a renforcé davantage l’engagement des deux gouvernements à mettre en œuvre de façon effective un système de plafonnement et d’échange de droits d’émissions de gaz à effet de serre (SPEDE) sur leur territoire.
La concertation entre ces deux gouvernements dans l’élaboration du marché de carbone nord-américain constitue un bel exemple de lutte contre le réchauffement climatique. C’est aussi un avantage à la fois économique et environnemental pour le développement durable. Le Québec est devenu après le retrait du Canada du protocole de Kyoto, la seule province du Canada à s’engager par des mesures formelles pour la réduction de l’émission de gaz à effet de serre, en établissant un permis de polluer, en imposant également des coûts supplémentaires aux entreprises les plus polluantes. Dans cette perspective, on cherche à savoir si les entreprises étrangères ne seraient pas plus intéressées à investir dans des provinces canadiennes où les mesures environnementales seraient moins sévères. Par ailleurs, il faut considérer les mesures de protection de l’environnement comme un devoir moral de l’État, faisant partie de ses prérogatives pour garantir le développement durable. En ce sens, l’établissement d’un marché de carbone au Québec par le droit d’émission de GES constitue un tremplin pour assurer la responsabilité sociale des entreprises face à l’environnement.
Le marché du carbone et la lutte contre le réchauffement climatique
Le marché du carbone a été initié lors du protocole de Kyoto en 1997. Il représente en principe l’ensemble des mécanismes d’échanges et de transactions des crédits de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le gouvernement québécois qui règlemente le marché du carbone établit des quotas d’utilisation de GES à des entreprises par un système de crédit–carbone ou le droit d’émission. L’entreprise qui dépasse le seuil recommandé devra payer pour l’utilisation supplémentaire. Bien que le marché du carbone soit réglementé, le droit d’émission de gaz à effet de serre n’est pas toutefois fondé sur une base égalitaire. Certaines entreprises seraient plus privilégiées que d’autres et obtiendraient plus de crédits pour polluer. Et parfois le prix du carbone est augmenté soit pour décourager certaines entreprises sur le marché, soit pour mettre plus de rigueur à l’utilisation des gaz à effet de serre. En Europe par exemple pour diminuer les risques énormes de pollutions de l’environnement on augmente le prix du carbone. Ce qui conduirait à la fuite de certaines entreprises vers d’autres régions. Dans ces conditions, la réglementation du marché de carbone au Québec peut-elle constituer à la fois un bénéfice pour l’environnement et un enjeu pour l’attractivité des entreprises étrangères ?
La régulation du marché de carbone au Québec : les avantages pour l’environnement et les enjeux à l’attractivité de l’investissement direct étranger
L’adhésion du Québec au Western climate initiative a abouti à la création du projet de loi no 42 de 2009, Loi modifiant la loi sur la qualité de l’environnement et d’autres dispositions législatives en matières de changements climatiques, adopté à l’unanimité par l’Assemblée nationale du Québec le 18 juin 2009 et devenu loi par sa mise en vigueur. Cette loi en substance, jette les bases du système de plafonnement et d’échanges de droits d’émissions de gaz à effet de serre, cible les principaux concernés et prévoit par réglementation gouvernementale, la mise en application des modalités et des conditions d’application des dispositions de cette loi. En exemple, le gouvernement a mis en oeuvre par la suite le règlement concernant la détermination des plafonds annuels d’unités démissions de gaz à effet de serre relatifs au système de plafonnements et d’échange de droits d’émissions de gaz à effet de serre pour la période 2013-2020, RLRQ cQ-2, r 15.2. Cette mesure constitue essentiellement un instrument politique expliquant les objectifs du gouvernement et surtout son engagement en matière de politique environnementale. À travers ce règlement, le gouvernement définit les limites d’émissions de GES sur l’ensemble du territoire de Québec pour arriver à atteindre des réductions d’ici 2020.
Entre autres, l’entente entre le Québec et Air Ressources Board de la Californie (CARB) a principalement introduit le marché du carbone au Québec. Le gouvernement pour se conformer aux exigences du système de plafonnement conclu dans cette entente, fixe des seuils de pollution, vend des droits d’émissions et procède par la taxation du carbone pour inciter les entreprises à adopter des conduites écoresponsables ou pour les encourager à limiter l’utilisation des produits énergiques non renouvelables. Mais qu’en est-il de l’impact de ces mesures environnementales sur le fonctionnement des entreprises et sur l’avenir de l’investissement direct étranger au Québec? Il y a, dans la politique du marché de carbone non seulement la cause environnementale, mais la gestion du profit qu’on en tire dans la régulation du marché. La règlementation du marché de carbone et sa rentabilité apparaissent dans une certaine mesure, doublement contraignantes pour les industries énergétiques. À cet égard, il est légitime de penser que les industries étrangères de consommation d’énergie et éminemment polluantes feraient mieux d’investir là où les règlements sur la protection de l’environnement n’en tiennent pas rigueur.
Bien que le marché du carbone se révèle un outil important pour contrôler les émissions de gaz à effet de serre, les variations en hausse du prix de carbone et la vente aux enchères du permis de polluer peuvent provoquer non seulement la fuite de certaines entreprises au Québec vers d’autres régions, mais une crainte de l’investissement direct étranger dans les domaines de l’énergie. Pour l’heure, le protocole d’entente sur le système de plafonnement et d’échange de droits d’émissions de gaz à effet de serre est encore à son niveau d’essai au Québec. Mais le marché du carbone a déjà atteint un niveau dispendieux pour les entreprises. Ainsi, ce serait mieux que le gouvernement trouve dans ses règlementations un juste milieu entre sa politique environnementale et celle de l’incitation aux investissements.
Delima Thing-weck
Étudiant à la maîtrise (DRT 6830)
Ce contenu a été mis à jour le 28 mars 2016 à 15 h 58 min.
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