Commerce, Confiance et Protection d’intérêts après l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne (AECG)

Avant-Propos

Les autorités politiques du Canada et de l’Union européenne, ont annoncé au cours des dernières années, des négociations et la conclusion de deux accords commerciaux majeurs : L’Accord Économique et Commercial Global entre le Canada et l’Union européenne (AECG) signé le 26 septembre 2014 puis le Partenariat Transatlantique de Commerce et d’Investissement, plus connu sous son acronyme anglais (TTIP) dont les négociations ont débuté en juin 2013 entre l’Union européenne et les États-Unis. Des deux côtés de l’Atlantique, l’ampleur des champs couverts par ces accords suscite des réactions contrastées. En Europe, on s’interroge sur la pertinence des accords de libre-échange dans un contexte de crise économique et de crise de confiance envers les pouvoirs publics. Au Canada, le souvenir des contestations qui ont accompagné les négociations et la ratification de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) reste encore vivace et l’opinion publique nationale demeure réticente quant aux gains réels qu’elle peut espérer d’une plus grande ouverture du marché national aux produits et aux investisseurs étrangers. Et pendant que ces débats ont cours, la signature d’un autre accord économique international majeur est annoncée: le Partenariat Trans pacifique (PTP) conclu le 5 octobre 2015 entre douze pays d’Asie, du Pacifique et d’Amérique dont le Canada.

En attendant la ratification de ces différents accords par les parties concernées, il est remarquable de noter leur portée historique. L’AECG et le TTIP sont des accords de très large portée. L’AECG constitue l’accord de libre-échange le plus ambitieux que le Canada n’a jamais conclu depuis l’ALÉNA en 1994. Quant au PTP, une fois ratifié, il constituera très certainement, l’accord de libre-échange le plus vaste et le plus ambitieux de l’histoire. Ces accords de libre-échange dits de nouvelle génération comportent des chapitres qui débordent largement les champs d’application des accords de libre-échange classiques. Ils offriront ainsi un champ spatial plus étendu et des opportunités d’affaires plus grandes pour les entreprises des pays concernés.
De manière générale, les accords de libre-échange soulèvent beaucoup d’enthousiasme dans le milieu des affaires au contraire des opinions publiques auprès desquelles, ils suscitent énormément d’inquiétude. En Europe, au Canada comme ailleurs, le libéralisme économique intrigue et les opinions publiques semblent de plus en plus dubitatives quant à ses bénéfices réels pour le bien-être économique et social. L’opacité qui entoure la négociation de ces accords, les pertes de souveraineté nationale qu’ils impliquent et les mécanismes de mise en œuvre qui les accompagnent sont autant d’éléments discutables.

À partir de quelques enjeux-clés et sous des perspectives croisées (européennes et canadiennes), des chercheurs se sont penchés dans le cadre de ce numéro spécial, sur certaines dispositions de l’AECG et du TTIP dans le but de déterminer le degré de confiance qu’elles pourraient susciter, le niveau de transparence auquel elles obligent et finalement, leurs capacités à protéger les intérêts de toutes les parties prenantes.

Le thème choisi pour ce numéro spécial est donc annonciateur du propos : « Commerce, Confiance et Protection d’intérêts après l’Accord Économique et Commercial Global entre le Canada et l’Union européenne / Trade, Trust and Interest Protection after the Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA).

À travers ce mandat, cinq thèmes sont successivement déclinés : la contestation de l’arbitrage investisseur État (Prof. Hervé A. PRINCE, Université de Montréal), les enjeux culturels (Prof. Lucia Bellucci, Université de Milan), le commerce électronique (Prof. Nicolas Vermeys, Université de Montréal), la corruption (Prof. Amissi Manirabona, Université de Montréal. Une perspective citoyenne de l’AECG viendra conclure le propos et fera le pont avec les enjeux soulevés par le TTIP (Prof. Nanette Neuwahl, Université de Montréal).

À notre avis, aucune autre initiative de recherche de cette ampleur n’a encore été menée dans la francophonie sur ces enjeux soulevés par les accords ci-dessus énumérés. Bien que nous ayons choisi de publier à la fois en français et en anglais, il s’agit d’une démarche pionnière menée dans le cadre de publications anonymement évaluées par des pairs. Et comme toute démarche pionnière, ce numéro spécial comporte certainement ses lacunes qui interpelleront d’autres qui prendront sans nul doute la relève.

C’est donc avec beaucoup de fierté que j’ai accepté de diriger ce numéro spécial, fruit des recherches menées dans le cadre de l’Observatoire de l’intégration économique (OIE) de l’Université de Montréal que j’ai l’honneur de diriger.

Ce contenu a été mis à jour le 8 juin 2017 à 18 h 26 min.